The Hand of Merlin

Dernière création de Versus Evil, studio d’édition à l’origine de la saga remarquée Pillars of Eternity, The Hand of Merlin se situe au carrefour de multiples genres, univers et gameplays. Entre légende Arthurienne et ambiance post-apocalyptique, entre RPG au tour par tour et composante roguelite, le jeu nous immerge la tête la première dans une histoire que l’on croit connaître, mais qui n’a de cesse de nous surprendre. Du fait de sa grande composante narrative, le jeu nous place dans une aventure jalonnée par des choix déterminants. Il en résulte que le jeu paraît difficile à qualifier ou à placer dans une case. Mais n’est-ce finalement pas cela qui constitue sa principale force ? La réponse ci-dessous.

Les mythologies Arthurienne et Lovecraftienne : un curieux mariage qui fonctionne étonnamment bien

The Hand of MerlinTout d’abord, The Hand of Merlin nous place à la tête d’un compagnie de mercenaires chargés d’emporter le Saint Graal depuis la Terre d’Albion jusqu’à Jerusalem. Après l’échec du légendaire Arthur, nous devenons ainsi peu ou prou le dernier espoir de l’humanité. Sur leur chemin, nos héros n’auront de cesse de devoir composer avec différents évènements qui ne manqueront pas de surgir pour compliquer la progression vers le terre sainte. Parmi ceux-ci, les nombreux affrontements qui nous opposent aux abominations tentant de précipiter l’apocalypse apporteront leur lot de sueurs froides. Fort heureusement nous serons guidés par la main experte du grand Merlin, rescapé de la lutte contre les forces du mal. Nous aurons également le plaisir de croiser la route de figures emblématiques des légendes arthuriennes.

Toutefois, prenez garde, n’escomptez pas être bercés par un souffle épique tout au long de votre partie. En effet, la désolation et les ravages de la corruption octroient à l’ambiance du jeu des tonalités pour le moins accablantes. En effet, les paysages, discussions avec les autochtones rencontrés ainsi que les péripéties qui composent notre route comportent, pour la plupart, une part de noirceur très prononcée. Par ailleurs, les personnages qui composent notre équipe sont au nombre de 3. Au fil de notre avancée dans le jeu, nous pourrons débloquer de nouveaux éléments pour la constituer par le biais de défis qui pourront parfois se révéler quelque peu fastidieux. Chaque personnage dispose de compétences de base et de bonus passifs propres mais quelque soit la configuration, votre équipe comptera un guerrier, un archer et un mage. L’identité des personnages de base demeure assez classique pour ne pas dire fade, mais le fait de pouvoir opérer des synergies entre leurs effets passifs et leurs compétences nous a passionné.

Il est également très appréciable que chaque personnage dispose d’interactions exclusives au cours de certains dialogues. Cela permet d’en apprendre davantage sur leur psychologie, leurs motivations ou leur personnalité. En les humanisant ainsi, le jeu nous permet de tisser un lien avec nos protagonnistes, nous laissant par la même occasion dans un désarroi conséquent lorsque l’un d’eux vient à trépasser. Car effectivement, la mort peut survenir au détour d’un combat. Il faudra par conséquent bien choisir les moments propices à la bastonnade et ceux où il est préférable d’éviter le bain de sang. Pour cela, le jeu propose un système de navigation point par point, sur une carte proprement illustrée. On y repère facilement les villes, donjons et simples points de passage par lesquels notre aventure sera entrecoupée. Aussi, une brève description indique clairement les risques encourus avant de se rendre à telle ou telle destination, de sorte qu’en avançant dans le jeu, on apprend à construire son itinéraire à l’avance sans toutefois s’interdire de l’adapter si besoin.

The Hand of Merlin : une histoire dont vous êtes (presque) le héros

The Hand of MerlinLe jeu dispose d’une solide structure narrative. Le lore profond et même parfois “épais” du jeu transparaît dans les innombrables dialogues et scènes qui se jouent sous nos yeux. Aussi, il nous paraît pertinent de mentionner le fait qu’il est véritablement nécessaire d’accepter ce parti pris. The Hand of Merlin offre une action hachée, à la croisée d’un Hand of Fate et d’un Wartales. Aussi, si vous n’appréciez pas la lecture dans les jeux en général, il peut être difficile de profiter du scénario. Les cinématiques, bien qu’à la fois finement réalisées sur le plan graphique et empreintes d’un minimalisme poétique, ne vous aiguillerons pas vers sa compréhension. Si en revanche, vous êtes de ceux qui aspirent à se délecter des traits d’humour insérés dans les dialogues, à se creuser les méninges pour déjouer les énigmes ou tout simplement à suivre le fil de l’histoire en spectateur attentif, vous serez comblés. Détail important toutefois : les textes sont intégralement rédigés en anglais. Le niveau de langue employé est plutôt de haut vol, ce qui placera le titre hors de portée de ceux qui aimaient à prolonger leur nuit durant les cours dispensés dans la langue de Shakespeare.

De plus, second bémol que nous pourrions apporter : de par son centrage sur la narration, le titre donne parfois l’impression au joueur de n’être qu’un spectateur face au cours des évènements. Malgré la multitude des choix offerts et l’importance des combats, ceux qui souhaitent avoir la main mise sur l’ensemble des ramifications de l’histoire peuvent avoir la sensation que celles-ci leur échappent en de nombreuses occasions. Du point de vue du gameplay, la grande force du jeu tient principalement dans le paradoxe entre la complexité des builds et la simplicité d’utilisation et de compréhension des différentes ressources. En effet, pour améliorer les personnages, il est d’abord possible de dépenser une première ressource : la renommée. Celle-ci, obtenable en réalisant des quêtes, en agissant de façon héroïque ou en triomphant de combats, devra atteindre la valeur de 50 pour nous permettre de passer au niveau suivant. Ce faisant, nous pouvons augmenter l’une des deux caractéristiques de chaque personnage (PV ou armure) et leur choisir une nouvelle compétence (ou les améliorer). Le second levier d’amélioration des personnages utilise une ressource tout aussi agréable à glaner que la renommée : l’or. Celui-ci permet, lors de nos passages dans des villes, et en de plus rares occasions lors de certaines rencontres, de faire appel au forgeron pour renforcer notre équipement.

Une belle aventure bien ficelée mais à la rejouabilité modérée

The Hand of MerlinAutre élément qui compose notre build, les reliques offrent la possibilité d’obtenir des effets supplémentaires qu’il faudra marier avec les archétypes de nos héros. Pour maintenir le lien avec notre mentor Merlin, le jeu offrira, en diverses occurences, la possibilité de glaner de l’essence et du mana. Si la première permet simplement de débloquer des sorts, la deuxième permettra quant à elle de les lancer au combat. Téléportation de héros, dégâts bruts ou de zone, soin direct… les possibiltiés offertes par cet élément sont multiples et renouvellent le gameplay des combats qui ont une fâcheuse tendance à devenir monotones. Terminons à présent notre analyse en nous penchant sur la rejouabilité. Celle-ci, bien qu’abreuvée par les innombrables lignes de texte et évènements divers que l’on peut rencontrer, trouve sa limite sur deux points. En premier lieu, les cartes explorables et qui composent notre odyssée dans sa partie macroscopique (aller de points en points) demeurent identiques à chaque partie. Bien que leur intérêt soit pérénnisé durant les premières heures de jeu par la curiosité que suscitent les chemins possibles, cette ardeur s’essouffle vite. Il faut toutefois mentionner la beauté des graphismes, les textures proprement ciselées attirent l’oeil et l’on prend plaisir à laisser divaguer nos yeux pour découvrir les éléments illustrés sur la carte.

Cela est tout aussi vrai en combat, où la propreté des décors est très appréciable, tout au tant que le design des ennemis. Tantôt classique avec les brigands et autres soldats rencontrés, tantôt intriguant et effrayant avec les abominations, celui-ci est très réussi. Néanmoins, la répétitivité des combats n’en demeure pas moins le second inconvénient. En effet, ceux-ci n’offrent que peu de possibilités d’utiliser l’environnement à son avantage. Les abominations rencontrées disposeront certes d’habiletés qui pimentent les affrontements mais les animations ne rendent pas toujours grâce aux idées des développeurs. On a également un peu trop vite fait le tour des synergies les plus efficientes, et les ennemis ne sont pas assez variés pour offrir de réelles perspectives de remise en cause pour nos builds ravageurs. En revanche, les niveaux de difficulté les plus élevés offriront un réel challenge. Chaque faux pas y sera sanctionné douloureusement, nous obligeant à mesurer les conséquences de chaque action entreprise.

Conclusion

Au terme de nos pérégrinations jusqu’à Jerusalem, The Hand of Merlin nous apparaît comme un jeu narratif de très bonne facture. Sa composante roguelite et son gameplay reposant sur des mécaniques de synergies bien huilées fonctionnent. Le jeu est beau, offre une résistance correcte et une expérience globalement très agréable. Toutefois, le jeu peine à convaincre sur le plan de la rejouabilité. Rapidement, la monotonie des combats prend le pas sur l’excitation curieuse qui s’était emparée de nous lors des premières échauffourrées. Et ce n’est pas le fait de pouvoir varier les sorts, les personnages ou la relique de départ (et le mentor associé) qui combleront ce vide. Notre épopée fut donc riche, agréable et stimulante mais nous avions faim de plus. Saluons enfin tout de même l’audace des développeurs, capables de nous vendre une légende arthurienne assez méconnaissable pour être raffraîchissante, et dont la poisseuse ascendance lovecraftienne nous aura harponné en plein coeur. 

*Test réalisé sur PC

The Hand of Merlin

22.49
7

Note

7.0/10

POINTS POSITIFS

  • Scénario et ambiance très réussis
  • Mariage osé mais concluant entre deux mythologies
  • Mécaniques de synergies dans le building des personnages
  • Graphismes soignés
  • Ecriture de haut vol, pour peu que la langue anglaise ne vous fasse pas peur

POINTS NÉGATIFS

  • Rejouabilité minée par la carte qui n'évolue pas au fil des parties
  • Combats monotones après une petite dizaine d'heures de jeu
  • Langue anglaise uniquement
  • Abondance de textes qui pourra rebuter les moins lecteurs d'entre nous
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Ace

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