Ce jeudi 30 janvier, lors de la 52ᵉ édition du festival d’Angoulême, se tenait la cérémonie des Prix Découvertes. De nombreux prix ont été décernés par un jury d’écoliers, de la primaire au lycée. Les lycéens ont récompensé Marie Bardiaux-Vaïente et Carole Maurel pour leur BD Bobigny 1972, retraçant un procès clé dans la légalisation de l’avortement en France à travers la vie de Marie-Claire Chevalier. Le duo a ainsi remporté le Prix des écoles 2025 dans la catégorie lycée. Nous avons échangé avec elles sur leur réaction et l’importance de cette distinction.

Geeknplay ( GNP) : Que ressentez-vous après cette victoire ?

Marie Bardiaux-Vaïente : C’est un grand bonheur ! Je pense que ça s’est vu sur scène. J’ai dédié ce prix à Marie-Claire Chevalier, car en 1972, elle n’aurait jamais imaginé que son nom puisse être honoré ainsi des années plus tard. Elle a été très éprouvée par cette affaire, et ce soir, je pense beaucoup à elle, je suis très émue. Les lycéens qui ont voté pour nous ont sans doute le même âge qu’elle avait à l’époque, ce qui rend cette récompense encore plus symbolique. Nous sommes extrêmement honorées et très fières de ce prix.

GNP : Justement, ce prix ne démontre-t-il pas que la BD peut aborder des sujets forts ?

Carole Maurel : Oui, bien sûr ! C’est un excellent médium pour cela. En tant que dessinatrice, je peux créer des décors, des effets visuels qui permettent de toucher un public très large.

Marie Bardiaux-Vaïente : C’est tout l’objectif de mon travail depuis 15 ans : rendre accessibles des sujets que l’on pourrait croire ardus ou difficiles à travers un médium populaire, dans son sens le plus noble. L’idée est d’y apporter une densité émotionnelle qui le rend transgénérationnel.

“Ensuite, en tant que dessinatrices, on s’approprie énormément le sujet. On essaie de se projeter dans les personnages, de se mettre à leur place pour ressentir ce qu’elles ont vécu, en puisant aussi dans notre propre expérience.” Carole Maurel

GNP : Comment, à travers le dessin, parvient-on à aborder des sujets aussi sérieux et importants ?

Carole Maurel : On discute beaucoup avec les scénaristes pour comprendre leur intention de mise en scène. Ensuite, en tant que dessinatrices, on s’approprie énormément le sujet. On essaie de se projeter dans les personnages, de se mettre à leur place pour ressentir ce qu’elles ont vécu, en puisant aussi dans notre propre expérience. Et bien sûr, on se documente énormément. C’est un sujet pour lequel il est essentiel de se renseigner, et on a la chance d’avoir beaucoup de sources à disposition, donc on n’hésite pas à les utiliser. C’est un mélange de réappropriation émotionnelle, de lecture et de prise d’informations.

GNP : Durant votre discours de remerciement sur scène pour le prix que vous avez remporté, vous avez évoqué les polémiques entourant le festival. Selon vous, sur quel domaine l’industrie de la BD doit-elle travailler pour instaurer une réelle égalité entre les hommes et les femmes ?

Marie Bardiaux-Vaïente : Il faut vraie réflexion sur les VSS (violences sexistes et sexuelles), c’est évident, ainsi qu’une écoute. Bon, nous, on y travaille, et quand je dis nous, je fais référence aux autrices qui, depuis des décennies, œuvrent sur ces questions, parce qu’il y a eu des pionnières dès les années 80, et nous avons pris la relève. Et c’est vrai que cela fait maintenant 10 ans que le collectif des créatrices de bandes dessinées contre le sexisme existe, que Me Too BD existe depuis 2 ou 3 ans, donc maintenant, ça suffit, quoi ! La bande dessinée ne fait que refléter ce qui se passe partout dans le monde patriarcal, et l’inclusion est donc essentielle à tous les niveaux. Que ce soit pour les questions de genre, de LGBTphobie, etc., le monde de la BD doit être le reflet d’une société moderne et contemporaine.

Carole Maurel : De toute façon, il y a de plus en plus de jeunes femmes qui sortent des écoles d’art. C’est un métier qui se féminise, comme d’autres secteurs, comme le jeu vidéo ou l’animation. Donc, on n’a pas le choix, il faut avancer sur ces questions-là.

GeekNPlay : Merci à Carole Maurel et Marie Bardiaux-Vaïente d’avoir répondu à nos questions.

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Loup solitaire naviguant seul entre des JRPG et des jeux d'action-aventure.

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