Sid Meier’s Civilization VII

Sid Meier’s Civilization VII est un jeu de grande stratégie sorti le 11 février 2025 sur PC, macOS, Nintendo Switch, PlayStation 4 et 5 et Xbox One et Series X|S. Il propose de traverser les âges de l’humanité en incarnant un dirigeant emblématique et en développant un empire qui a marqué l’Histoire. La licence n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il s’agit là de son septième opus. Est-il à la hauteur des précédents ? C’est ce que nous allons voir.

Sid Meier’s Civilization VII, une formule qui change… un peu

Depuis la sortie de son premier opus en 1991, la saga Civilization doit passer l’épreuve de sa réinvention. C’est donc sans surprise qu’encore une fois, Sid Meier’s Civilization VII prend ses distances avec son prédécesseur.

Visuellement d’abord, on revient à un style graphique plus réaliste, différent des textures lisses et très colorées, presque cartoonesques, de Civilization VI. Le rendu est satisfaisant sans être impressionnant, avec un plateau dynamique fourmillant de détails et un brouillard de guerre d’un noir profond qui rebute un peu au début, mais qui donne du cachet à l’ambiance générale du jeu.

Malgré ces quelques différences, la direction artistique est sensiblement la même. On se déplace sur des cases hexagonales, on développe son empire au rythme d’une bande-son excellente, tour à tour apaisante et épique, et on rencontre les dirigeants des autres empires, animés et doublés dans leur langue respective.

Cette incarnation est propre à la licence, mais elle est un peu moins sensible dans cet opus. En effet, les dirigeants adverses ont moins de lignes de dialogue que dans les autres jeux. Ils parlent lorsqu’on les rencontre pour la première fois, mais se contentent de simples sons le reste du temps. En outre, contrairement à Civilization VI, ils n’interviennent jamais pendant leur tour pour nous louer ou nous reprocher quelque chose. Cette perte d’immersion et de “vie” est plutôt regrettable.

La traversée mouvementée des âges

Passons aux choses sérieuses, c’est-à-dire au gameplay. La grande particularité de cet opus est la division de chaque partie en trois âges : l’Antiquité, l’Âge de l’Exploration et l’Âge moderne. Au cours de la partie, le joueur incarne le même dirigeant qu’il a choisi au départ mais change d’empire à chaque nouvel âge. De fait, chaque âge propose sa propre banque de civilisations. Cela sous-entend une autre singularité du jeu : les dirigeants sont désormais indépendants des empires. Autrement dit, Napoléon peut diriger aussi bien Rome que les Mayas.

Le joueur commence donc une partie en choisissant un dirigeant et un empire selon son style de jeu, qu’il soit expansionniste, culturel, commercial… Chaque dirigeant et chaque civilisation possède ses caractéristiques (bonus, unités, bâtiments) propres.

Au début de chaque âge, le joueur doit choisir le conseiller qui le guidera vers l’accomplissement de l’âge en question. Il peut s’agir d’un conseiller scientifique, économique, culturel ou militaire. Il faut alors remplir les objectifs qu’il fixe afin de progresser. À noter que le conseiller n’est là que pour guider le joueur dans la voie qu’il préfère : celui-ci peut à tout moment changer de conseiller ou consulter et remplir les objectifs des autres voies. Si ce système a l’avantage de ne pas perdre les débutants, il a en contrepartie le défaut de rendre le gameplay moins libre et plus prévisible.

La mécanique de changement d’âge peut également se révéler frustrante à plusieurs égards. En effet, changer d’âge force d’abord le joueur à changer d’empire, c’est-à-dire de caractéristiques mais aussi d’identité, ce qui peut nuire à l’immersion. Le joueur qui souhaite incarner Rome n’a peut-être pas envie de devoir jouer l’Espagne à l’âge suivant. En outre, le changement d’âge provoque des pertes dans son empire. Le joueur conserve ses villes (même si toutes sauf la capitale redeviennent des communes, nous y reviendrons), ses bâtiments, ses aménagements et certaines unités, mais il perd les autres, les bâtiments exclusifs et les merveilles, et voit ses rendements baisser.

En revanche, la transition d’Âge permet de changer de capitale, ce qui n’est pas inintéressant stratégiquement, et l’on obtient surtout des bonus (les héritages) en fonction des accomplissements atteints durant l’âge précédent dans chaque domaine (économique, militaire…). Si tous les objectifs ont été accomplis, on bénéficie d’un bonus d’âge d’or.

À chaque âge, le joueur peut choisir un gouvernement à adopter qui propose deux bonus dans des domaines différents. Régulièrement au cours de l’âge, il doit opter pour un des deux bonus de gouvernement selon la situation qu’il traverse. Par exemple, il peut avoir le choix entre un meilleur rendement en or ou une vitesse de production accrue pour les unités militaires pendant un certain nombre de tours.

Les parties sont aussi rythmées par des choix narratifs qui dépendent des actions accomplies lors des tours. Ils demandent au joueur d’opter par exemple entre un bonus d’or ou un bonus de science. Parfois, ils peuvent même apporter des points d’attributs de dirigeant. Ces points peuvent être dépensés dans 6 arbres différents (scientifique, expansionniste, culturel…) pour bénéficier de bonus. Si ces choix narratifs ajoutent un peu de piment au jeu, on peut néanmoins regretter l’absence de conséquences réelles sur le déroulé de la partie.

Attention cependant : en parallèle de ces nombreux bonus, des crises attendent au tournant. En effet, plus on se rapproche de la fin d’un âge, plus la barre de crise se remplit. Arrivée à un certain point, elle déclenche une crise : le joueur est forcé d’adopter une doctrine de crise qui lui impose de lourds malus. Plus on se rapproche de la fin de l’âge, plus les doctrines à activer sont nombreuses.

Bâtir un empire pérenne

Comme d’habitude, on progresse dans une partie en apprenant des technologies et des dogmes répartis en arbres, grâce à la science et à la culture accumulées chaque tour. La particularité de cet opus est que certaines technologies et dogmes possèdent une “maîtrise”, c’est-à-dire un deuxième niveau d’apprentissage qui débloque de nouvelles caractéristiques sans pour autant progresser dans l’arbre. En outre, chaque empire possède son propre arbre de dogmes avec des bonus de civilisation exclusifs.

Les dogmes permettent notamment de débloquer des doctrines que l’on peut assigner en nombre limité pour bénéficier de bonus. Il peut s’agir par exemple d’améliorer la production d’or ou de bonheur par ressource exploitée, ou encore d’augmenter la vitesse de formation d’unités militaires.

Pour en finir avec la gestion à grande échelle, les tours sont également occupés par la diplomatie avec les autres civilisations. Comme d’habitude, il est possible de faire la guerre, d’espionner, de dénoncer ses rivaux, mais aussi de s’allier à eux. Néanmoins, il n’est plus possible d’échanger des ressources comme dans les précédents jeux. Les seules options qui demeurent sont l’usage de routes commerciales et l’organisation d’événements communs. En effet, en dépensant de l’influence (une statistique qui croît chaque tour), il est possible de négocier avec un autre dirigeant pour augmenter le bonheur, l’or ou encore la culture de chacun. On peut également soutenir l’initiative du dirigeant rival sans dépenser d’influence, ce qui ne profitera qu’à ce dernier.

Bien entendu, l’expansion territoriale et la gestion des villes sont aussi des composantes majeures de la saga Civilization. Dans cet opus, toute ville fondée avec un colon est d’abord une commune. Il s’agit d’une ville dans laquelle on ne peut pas construire de bâtiments mais qui génère plus d’or par tour qu’une ville normale. Il faut payer pour la convertir en ville, d’où un équilibre à trouver. D’autant plus qu’il existe un nombre limité de villes conseillées, au-delà duquel on subit des malus.

Il existe aussi des cités-États, c’est-à-dire des villes indépendantes avec qui il est possible de s’allier. En échange d’une grande quantité d’influence, une cité-État alliée peut même être absorbée dans son empire et devenir une commune. En dehors de cela, les cités-États sont peu utiles.

Contrairement aux opus précédents, il n’est plus possible d’exploiter les cases de son territoire avec des bâtisseurs. Néanmoins, à chaque fois que le nombre de citoyens d’une ville augmente, on peut l’assigner à une case de cette ville afin qu’il l’exploite. Cela a pour effet d’ajouter les cases adjacentes à notre territoire et de nous faire bénéficier des ressources de la case exploitée. Ces ressources peuvent ensuite être assignées à une ville afin de toucher des bonus divers et de renforcer le bonheur, dans le cas des ressources de luxe.

Les cases non aménagées de notre empire peuvent accueillir un quartier comptant au plus deux bâtiments. Les bonus apportés par les bâtiments varient selon le quartier occupé, il faut donc optimiser ses choix. Parfois, des catastrophes naturelles comme des crues ou des tempêtes viennent détruire nos bâtiments et nos aménagements, ce qui requiert de les réparer.

Quand le nombre de citoyens augmente dans une ville qui possède au moins un quartier rempli, on peut choisir de placer un spécialiste dans ce quartier, au lieu d’exploiter une nouvelle case. Ce spécialiste augmente les rendements du quartier mais fait baisser le bonheur et la nourriture en contrepartie. Or un déficit de nourriture peut susciter une famine, tandis qu’un bonheur négatif est à même de faire naître des révoltes. Une ville en sécession rejoint ainsi la civilisation adverse la plus influente des environs.

Lors de l’Âge de l’Exploration, il est possible de fonder une religion, qui apporte des bonus aux villes qui y sont converties. Évangéliser des villes adverses à l’aide de missionnaires permet également d’accomplir certains objectifs en vue de l’âge suivant. Enfin, certains bâtiments peuvent contenir des codex ou des reliques qui apportent des bonus en science ou en culture. Mais contrairement aux œuvres d’art des opus précédents, on n’a pas droit à des extraits doublés de vrais textes lorsqu’on les obtient. D’ailleurs, le jeu ne possède pas de personnages illustres, ce qui représente une perte d’incarnation et de références historiques. Heureusement, les technologies et les dogmes s’accompagnent toujours de citations.

Des petits défauts ternissent le bilan de Sid Meier’s Civilization VII

Sid Meier’s Civilization VII possède donc un gameplay riche et complexe avec un bon équilibre entre les acquis des opus précédents et les particularités nouvelles. Néanmoins, il souffre d’un manque d’immersion et d’un aspect quelque peu lissé voire linéaire à cause de son système d’âges et d’objectifs à atteindre. Certains éléments de gameplay sont aussi trop peu exploités, comme les choix narratifs qui peinent à peser dans les parties.

Mais d’autres problèmes plus pointus se manifestent aussi en jouant. L’un des plus évidents est sans doute la faible intuitivité des interfaces. En effet, il est difficile d’accéder à certains menus à cause de la nécessité d’emprunter des chemins intermédiaires. Par exemple, pour trouver le menu des attributs de dirigeant, il faut d’abord passer par le menu de son dirigeant. En outre, il est ardu de connaître toutes les unités que l’on a en notre possession ainsi que leur position, tout comme il est difficile de lire le menu des statistiques des villes, sur lequel on ne distingue par ailleurs pas les villes des communes.

D’autres problèmes mineurs sont à signaler. Par exemple, l’impossibilité de renommer ses villes et ainsi de personnaliser ses parties, bien qu’un patch soit censé bientôt corriger cela. En outre, une fois les actions d’une unité accomplies, le jeu ne nous dirige pas automatiquement sur l’unité suivante comme dans les précédents opus. Il faut donc à chaque fois cliquer sur le bouton “Unité en attente d’ordres”, ce qui peut provoquer une perte de temps et un certain agacement.

Enfin, une nouveauté qui peut à la fois plaire et décevoir est le fait qu’il faille débloquer certaines civilisations en remplissant des objectifs précis. Par exemple, posséder un certain nombre de temples et d’éléphants débloque le Siam pour l’Âge de l’Exploration. Certains joueurs pourraient se retrouver frustrés de ne pas avoir accès à tout le contenu du jeu dès le départ. D’autres, au contraire, sont susceptibles d’apprécier la rejouabilité offerte par le fait de devoir viser des objectifs pour découvrir le titre dans son entièreté.

Conclusion

Sid Meier’s Civilization VII a tout pour succéder à ses prédécesseurs et plaire aux fans de la licence. Comme d’habitude, la direction artistique est une réussite, surtout la bande-son de très grande qualité. Quant au gameplay, complet et varié, il est à la fois fidèle à la saga et innovant sur un certain nombre de points. Notamment la transition entre les âges et les empires.

En revanche, cette nouveauté est aussi à l’origine d’une perte d’incarnation que l’on ressent également dans d’autres éléments du jeu. En outre, la progression paraît parfois très linéaire et certains éléments de gameplay, tels les choix narratifs ou les cités-États, trop superficiels. À cela s’ajoute la frustration née des problèmes d’interfaces. Tant d’éléments qui peuvent agacer et limiter la rejouabilité du titre.

Test effectué sur PC via un code fourni par l’éditeur.

Sid Meier's Civilization VII

7.8

Note

7.8/10

POINTS POSITIFS

  • La direction artistique réussie, notamment la musique.
  • La possibilité de choisir un dirigeant indépendamment de la civilisation.
  • Le gameplay toujours aussi riche et complet.
  • Le bon équilibre entre les fonctionnalités habituelles et les nouveautés.
  • Une certaine rejouabilité offerte par les changements d’Âges.

POINTS NÉGATIFS

  • Le manque d’incarnation et de côté “vivant”.
  • La progression trop linéaire qui lisse le gameplay et réduit le champ des possibles.
  • La faible exploitation de certaines mécaniques, notamment les choix narratifs.
  • Les interfaces peu intuitives.
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Paprika

L'écriture et le gaming sont mes passions, donc j'ai fait d'une pierre deux coups. Fan éternel de Nintendo et de jeux indé.

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